jeudi 1 décembre 2016

"Slasher" et heureux de l'être


Slasher et heureux de l'être
Je cumule (plusieurs emplois)
donc je suis
Comme Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, j'ai réalisé il y a peu que, pour ma part, j'étais un slasher (prononcez "sla-cheur") qui s'ignorait.

Vous aussi peut-être si vous cumulez comme moi plusieurs emplois.

L'expression vient du signe "/" (slash en anglais) qui sépare nos différentes activités profession-nelles. Ce qui donne, dans mon cas : conseillère à l'emploi/enseignante/formatrice. Rien de très nouveau me direz-vous. Il y a longtemps que nombre d'entre nous occupent deux, voire trois, emplois pour joindre les deux bouts à la fin du mois...



Pourtant, la réalité actuelle est plus subtile. Les slashers - ils sont plus de deux millions selon l'INSEE - cumulent plusieurs emplois non seulement pour s'en sortir financièrement mais surtout parce qu'ils refusent de s'enfermer dans un seul métier. S'appuyant sur une autre vision du travail, ils cherchent avant tout à s'épanouir et à donner du sens à leur vie. Pour certains, être slasher, c'est même faire tout ce qu'on aime (et essentiellement ce qu'on aime), avec éventuellement des activités bénévoles qui se glissent entre deux slashes

Si les slashers choisissent de recourir à plusieurs jobs en majorité pour gagner plus d'argent, ce n'est pas forcément un choix contraint ou subi. Plus des deux tiers ont en effet choisi ce mode d'activité professionnelle. Pour beaucoup, il s'agit surtout de cumuler un "job alimentaire" avec une activité qui les intéresse davantage. Moins prisonniers d'un schéma de pensée, les slashers présentent des profils atypiques et une plus grande facilité à penser out-of-the-box, hors des sentiers battus.

Conscients de l'infinité des possibles, les slashers multiplient les opportunités, leurs activités pouvant alors s'enrichir l'une l'autre. Toujours en ce qui me concerne (vous me pardonnerez cet exemple personnel !), les cours que je donne tournent autour du projet professionnel et de l'orientation tout au long de la vie. Ces thématiques s'inspirent de mon emploi de conseillère en insertion et vice versa. 


Les pluriactifs ont un sentiment de plus grande liberté. Avec plusieurs cordes à leur arc, ils ne dépendent plus d'un seul employeur. "Dans le cumul d'emplois, il y a une forte dimension anti-autoritaire, l'idée que l'on ne devient soi-même que si l'on est auteur de sa propre vie", remarque le sociologue François de SINGLY.

Le premier à m'avoir fait réfléchir à cette façon de voir est en fait un enfant de 7 ans (mon propre fils) qui m'a dit un jour : "Moi, je veux être pilote de course automobile et arbitre de football et architecte". Mon premier réflexe à l'époque consista à lui expliquer doctement qu'il fallait choisir, qu'on ne pouvait pas tout faire... 

Depuis, ma réflexion a cheminé ! Je suggère d'ailleurs souvent aux personnes que j'accompagne d'envisager une pluriactivité. Surtout, par exemple, si elles souhaitent être indépendantes ou tester une idée en vue de créer leur entreprise ou encore préparer une reconversion avec, souvent, une seconde activité dans un secteur complètement différent de la première.

Ne nous leurrons pas : ce nouveau mode de vie professionnelle ne présente pas que des avantages. Il peut augmenter notamment la difficulté à encadrer le travail, y compris l'activité salariée classique, en créant des souplesses nouvelles mais aussi des risques de dérives accrus. Autre inconvénient : à s'éparpiller entre plusieurs emplois, le risque est grand de se morceler et de perdre son identité.

Le "slashing" ne convient donc pas à tout le monde. Mais si vous êtes tenté par plusieurs carrières, si vous vous intéressez à divers domaines sans vouloir choisir ni être frustré par l'abandon de certains projet, si vous cher chez une certaine autonomie, vous y trouverez votre équilibre tout en sortant de la routine et en continuant à apprendre sans cesse.

Si vous slashez vous aussi, n'hésitez pas à faire remonter vos témoignages : j'aurai plaisir à les découvrir.

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